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Comment les résidences seniors se réinventent ?

PHOTOS. Avec le vieillissement de la population, promoteurs et investisseurs se tournent de plus en plus vers la résidence senior. Des habitats obligés de se réinventer pour répondre aux défis de demain.

Comment les résidences seniors se réinventent ?
Comment les résidences seniors se réinventent ?

"Tout a commencé avec l’AVC de mon mari, en 2015", nous confie Madame Bobot. Du haut de ses 86 ans, cette ancienne habitante de Meudon a dû quitter sa grande maison avec son époux de 90 ans pour prendre ses quartiers dans une résidence senior, du côté de Sèvres. Là, ils vivent depuis 2 ans dans un appartement meublé d’une cinquantaine de mètres carrés. "L’idée nous trottait dans la tête depuis une dizaine d’années", avoue-t-elle. "Nous repoussions l’échéance. Il faut dire que nous vivions dans notre maison de Meudon depuis 40 ans. Mais avec le temps, elle devenait dangereuse pour nous. Les voisins nous ont toujours proposé leur aide, mais nous n’osions pas les déranger." (Photo : Le couple Bobot)

Des récits comme celui-ci, David Jaroniak, directeur général adjoint du Cogedim Club, en entend presque tous les jours. "Ces personnes réalisent que leur maison est inadaptée à leurs nouveaux besoins. D’où
l’importance de l’emplacement pour une résidence senior. Tout doit être à 400 mètres maximum du lieu de vie, sur un terrain plat, en centre-ville. Au-delà, on sort de la zone de confort
." Outre l’ensemble des commodités à proximité (tabac, supermarché, pharmacie…) chez Cogedim, comme ailleurs, ont fourni des prestations aux personnes âgées allant des cours de sport, de cuisine ou d’œnologie à la possibilité de se restaurer au sein de l’immeuble avec toute les commodité d’un bon restaurant. "Une résidence senior n’est pas une maison de retraite", précise-t-il.

Jusqu’à 2 500 € de loyer tous les mois

Quelle différence avec une maison retraite ? L’indépendance. De l’avis des hommes et femmes interrogés, c’est ce qu’ils sont venus chercher. Si la dimension sécuritaire, avec du personnel paramédical et des aides-soignants présents 24h/24 les rassure, ces facteurs ne doivent prendre le pas sur leur liberté. Une émancipation qui a coût. De Cogedim à Bouygues en passant par Vinci, l’ensemble des promoteurs proposent des tarifs assez similaires avec un démarrage aux alentours de 1 000 € par mois pour un studio d’une trentaine de m² à 2 500 € pour un T2 de près de 60 m² pour des couples. Des sommes considérables, sachant qu’en France, selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Dress), la pension de retraite moyenne est évaluée à 1 376 € brut. (Photo : une chambre dans un appartement de la résidence Cogedim Club à Sèvre)

"Nous avons à l’esprit la question du loyer", assure Laurence Picano, directrice des résidences seniors Ovelia, filiale de Vinci immobilier. "Tout le monde ne pourra pas vieillir dans ces résidences. Nos biens viennent cibler la catégorie de la population qui n’a pas vocation à vivre dans le parc social." Mais y a-t-il vraiment assez de logements pour les personnes âgées à venir, même dans le parc public ?

La question de l’habitat de cette catégorie de la population risque poser problème dès 2050, et bien après. Les projections de l’Insee avancent l’idée selon laquelle un Français sur 3 aura plus de 60 ans en 2050 et que la part des jeunes actifs pourraient être inférieure à celle des retraités. "Je crois que tout le monde est en train de prendre conscience de ce phénomène", anticipe David Jaroniak. "Très vite, des structures low coast vont naître, à des prix plus bas. La multiplication des productions de résidences seniors va également avoir un impact, à la baisse, sur les prix à moment donné".


(Photo : Piscine de la résidence de Royan de la gamme Ovelia)

Les investisseurs ont, eux, compris qu’il y avait un coup à jouer. Depuis 2 ans, les professionnels observent une appétence du monde institutionnel pour cette gamme de logements.

La maison de demain

Du côté des promoteurs, chacun planche sur la résidence senior de demain. "Pour l’instant nous avons de la petite domotique dans nos logements", détaille Julie Roujoux, directrice en charge des résidences services de Bouygues Immobilier. "Ces outils peuvent piloter la porte, les fenêtres ou encore l’éclairage à distance. Mais il ne faut pas sous-estimer l’appétence des personnes âgées pour les nouvelles technologies. Prenez Skype. Si vous leur expliquez clairement comment cela fonctionne, ils ne se gêneront pas pour l’utiliser." (Photo : Résidence Les Jardins de St Nicolas à Nancy de chez Bouygues immobilier)

Chez Bouygues, comme chez Cogedim, c’est plutôt du côté des capteurs et autres interrupteurs connectés que l’on travaille. Des technologies capables de mémoriser des schémas de déplacement du résident et ainsi alerter dès qu’ils détectent une anomalie. "On peut également penser au mobilier design, comme la possibilité d’avoir un petit siège à l’intérieur d’un meuble dans l’entrée afin de mettre ses chaussures sans avoir à se baisser", indique Laurence Picano.

D’autres, comme Eiffage, explorent le territoire intergénérationnel. "Cela n’empêche pas de faire des résidences seniors", avertit Philippe Plaza, président d’Eiffage. "Mais nous pensons que la principale difficulté d’une personne âgée est l’isolement. Dans nos résidences intergénérationnelles, sur lesquelles on travaille avec la société Recipro-cité, nous mettons à disposition 1/3 des maisons pour les seniors et le reste pour des familles." Le modèle reprend celui des HLM. "Dès qu’un maire manque d’habitats pour les personnes âgées, il peut faire appel à nous et notre gamme d’appartements Cocoon’ Ages®", renchérit-il. Une quinzaine de projets sont en cours de développement partout en France, soit près de 1 000 logements combinant architecture adaptée avec des espaces partagés et des animations pour favoriser l’entre-aide entre les résidents. (Photo : exemple de résidence Cocoon’ Ages®)

80 ans, le nouveau 20 ans

L’âge moyen d’entrée dans ces résidences se situe autour de 70 ans. Une étape dans la vie encore riche en aventures pour David Jaroniak. "Nous avons eu un couple récemment. La femme est morte. Le mari a réussi à surmonter sa douleur et est aujourd’hui en couple avec une nouvelle personne", raconte David Jaroniak. "La vie en communauté redonne envie à certaines femmes d’être plus coquettes qu’au moment où elles sont entrées chez nous. Des liens d’amitié se tissent." De là à croire que 80 ans serait le nouveau 20 ans, il n’y a qu’un pas.

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